Les banques de Casino poussent à un recentrage sur la France

Rédigé le 05/10/2022


Les créanciers du distributeur veulent un virage stratégique l’an prochain pour préparer les échéances de 2024. Elles demandent la vente des filiales en Amérique du sud ainsi qu’une alliance en France.

Cette fois, Casino ne peut plus attendre. Le groupe de distribution doit accélérer sa restructuration et passer à l’action. Dans deux semaines, il bouclera la vente de sa filiale GreenYellow dont il récupèrera 600 millions d’euros de cash. Casino aura quasiment bouclé son plan de cessions d’actifs de 4,5 milliards d’euros. Mais il ne permettra pas de rembourser sa dette qui ne cesse d’augmenter et culmine à 7,5 milliards d’euros au premier semestre 2022.

Ses principales banques, Crédit Agricole, BNP Paribas et Natixis, attendent depuis quatre ans le désendettement du groupe. Les cessions de murs et de filiales non-stratégiques (comme Leader Price ou Floa Bank) ne suffisent plus. Casino est un "dossier de place" qui concerne toutes les grandes banques françaises. Officiellement, elles restent silencieuses. Mais dans l’anonymat, elles veulent désormais des actes forts.

"La restructuration tarde et les banques se lassent de voir les années passer, s’impatiente le cadre d’un des trois prêteurs. Il faut agir l’année prochaine et l’Amérique latine est facile à vendre".

Le ton change au sein des banques

Ses activités au Brésil, en Colombie et en Uruguay valent environ 2,5 milliards d’euros. Casino les a réorganisées puis scindées en trois pour les céder plus facilement par pays. "Ça va se faire mais ça prend du temps, tente de temporiser une source dans l’entourage de Casino. La Colombie et l’Uruguay peuvent être vendues au premier trimestre 2023". Le temps presse. En janvier 2024 doit être remboursée une dette de 800 millions d’euros et cette fois, les banques ne repousseront pas l’échéance. "L’ensemble des engagements avec les créanciers seront tenus", promet une source proche du groupe.

Mais le ton a changé au sein des banques de Casino. Depuis quatre ans, la pression était sur les sociétés personnelles (Rallye, Euris, Finatis…) du propriétaire et PDG, Jean-Charles Naouri. Rallye, qui contrôle Casino croule sous 3 milliards d’euros de dettes mais Casino restait jusqu’ici épargné. Désormais, l’ensemble de la "galaxie" est ciblé par les investisseurs alors que le groupe vaut désormais moins d’un milliard d’euros en Bourse. Et les banques françaises, qui ont prêté à tous les étages de l’édifice, sont coincées. "Tout le monde est piégé par les cascades de holdings et personne n’a intérêt à ce que ça tombe, décrypte un autre banquier de Casino. Il faut une restructuration ordonnée".

Selon nos informations, des banques mènent des réflexions stratégiques, en lien avec Casino, autour d’un recentrage sur la France avec Monoprix, Franprix et CDiscount. La suite de l’histoire est encore en suspens… Plusieurs options existent. La méthode forte consisterait à adosser le groupe à l’un de ses concurrents, Carrefour ou Auchan. "C’est le seul moyen de récupérer le plus d’argent possible, revendique un dirigeant d’une banque de Casino. Même si on sait très bien qu’on ne sera jamais remboursé en totalité". Et pour cause, selon plusieurs sources, les banques françaises ont passé dans leurs comptes des pertes sur une partie de leurs prêts à la galaxie de Jean-Chales Naouri. Ce scénario ne fait pas consensus parmi les créanciers de Casino qui ont bien conscience qu’il favoriserait ses concurrents. "On sait bien que Carrefour guette", ajoute une source bancaire.

L’autre option, plus douce, vise à nouer une alliance en France, sans toutefois forcer Jean-Charles Naouri à vendre Casino. Le groupe est en train de réunir sous le même "toit" ses trois marques phares Monoprix, Franprix et CDiscount. "Le regroupement des activités françaises permet de faire entrer un partenaire pour remonter du cash", explique un proche du PDG. Ce scénario est sérieusement étudié par une banque française. "Nous menons avec Casino des réflexions sur une ouverture de l’actionnariat en France", confirme une source proche de ce prêteur qui tient à rester anonyme. Cette solution permettrait d’engager un mouvement de consolidation, inévitable en France, tout en ménageant Jean-Charles Naouri qui a bâti son empire depuis trente ans.

Le PDG, âgé de 73 ans, n’a pas d’héritier en interne et beaucoup de ses lieutenants sont partis ces derniers mois. Sa succession n’a jamais été abordée. C’est aussi ce sujet tabou que ses créanciers veulent mettre sur la table pour accélérer la restructuration de Casino.

Crédit BFMTV